Les années Jeef

On ne peut pas tout avoir : le beurre, et l’argent du beurre. Je n’ai pas réussi à signer une voie complète entre le glacier des Etançons et les arêtes, mais d’avoir fait la première voie du Bastion est en soi un privilège. D’aussi belles occasions, il n’en restait pas beaucoup, même s’il en restait quelques-unes – il suffisait de farfouiller un peu. Ainsi, j’ai eu la chance vers 1975-76 de « découvrir » un autre bijou de l’Oisans qui semblait avoir échappé aux chasseurs de premières : le versant sud du Rouget. Je me demande d’ailleurs s’il ne m’a pas un peu détourné de la Meije…


Le Rouget vu depuis le vallon des Etages. La face sud se perche au faïte d’un socle hautain, afin de mieux se dissimuler aux regards. A gauche, le cirque du Soreiller s’expose au soleil et aux visiteurs…

Car il y avait encore des chasseurs, et justement la muraille des Etançons en garde la trace. Il se passait aussi des choses dans le versant nord, mais peut-être moins significatives, comme la voie ouverte en 1971 par Narcisse Candau sur le contrefort rive gauche du couloir Gravelotte. Narcisse a été un alpiniste et un guide exemplaire, faisant son boulot avec une discrétion et une abnégation rares. Il a ouvert pas mal d’itinéraires en Oisans, souvent dans les coins les plus délaissés, à la mesure de sa modestie naturelle, ce qui lui a valu un certain dédain de la part des institutions. Il m’avait demandé de la parrainer pour le Groupe de Haute Montagne, mais lorsque j’ai présenté sa candidature, il m’a été répondu que Narcisse se spécialisait beaucoup trop dans les courses « secondaires »…


Pointe Swan, Pointe Buisson, Pointe Marguerite, vues depuis Lauranoure: l’Oisans « sauvage », presque primitif, que Narcisse n’a cessé de parcourir en tous sens

En face nord, il y a eu aussi de jolies réalisations glaciaires, notamment les goulottes de la Troisième Dent remontées d’abord par Jérôme Biju-Duval et Gilles Sourice, pas loin du couloir Gravelotte. Néanmoins, c’est quand même dans la muraille sud que les plus beaux tracés ont vu le jour. L’enchaînement Bastion + voie Dibona-Mayer avait été fait en septembre 71 par Michel Brissaud, Jean-Marie Leroux et Vincent Péguy, avec un bivouac en haut du Bastion (plus confortable que le nôtre !). Cependant il n’y avait pas de raison pour qu’il n’existe qu’un seul cheminement dans un ensemble aussi vaste – il suffisait d’accepter de s’engager.


La Pointe d’Amont, au faîte du Soreiller. Au loin le Râteau (avec le Pilier Candau) et la Meije

En 1973 c’est la partie la plus à gauche du Bastion qui a été remontée, à l’aplomb de la Dent Zsigmondy. Un premier parcours a mené les frères Batard jusqu’à la Banquette des Autrichiens, puis la totalité de la muraille a été escaladée par Bernard Macho et Daniel Claret-Tournier. C’est une voie où on ne rencontre personne aujourd’hui. C’est vrai que la partie inférieure, un peu trop riveraine du couloir Zsigmondy, n’est pas très attrayante. En revanche la partie supérieure doit être pas mal du tout : sortir à la Dent Zsigmondy directement par les abîmes des Etançons, voilà qui ne doit pas manquer d’ambiance !


L’enfilade des quatre Dents de la Meije, vue du sommet du Grand Pic. Du côté des Etançons (à droite), un vide dolomitique!
La 3ème Dent et le Doigt de Dieu jouent à qui surplombera le plus…

La combinaison la plus réussie a été faite par Bernard Francou et Vincent Péguy, en 1978 et en deux temps. Ils ont démarré par le Bastion pour dépasser la première barre de surplombs, puis ils sont partis dans les dalles de droite à mi-chemin entre notre voie de 1969 et la voie du Doigt de Dieu, traçant un itinéraire rectiligne, difficile et engagé (comme toujours avec Francou !). Ils sont sortis par la Banquette pour revenir quelque temps après afin d’attaquer la muraille supérieure à la verticale de la Troisième Dent, tout près de l’endroit où Jeef et moi l’avions abordée en 1971. Il y a là une cheminée très haute, très profonde, surplombante et assez terrifiante. Avec Jeef, nous l’avions rapidement éliminée pour choisir les dalles voisines. Francou et Péguy se sont balancés dedans jusqu’à ce qu’elle les recrache à mi-hauteur, les contraignant à basculer dans les dalles au prix d’une longue et périlleuse traversée. Après, ils ont pu rejoindre les arêtes entre la Troisième et la Quatrième Dent dans du terrain moins diabolique. Il y a dans tout ça un détail piquant, surtout pour moi : quand j’examine ce tracé final, je me dis que l’aboutissement de leur traversée du diable se situe juste au-dessus du point où j’ai fait demi-tour en 1971 – il s’en fallait peut-être d’une quarantaine de mètres…


La partie supérieure de la Muraille des Etançons. 1: voie Macho / 2: voie Dibona-Mayer (2a: var.rocheuse en 5+ expo, magnifique / 2b: sortie Stofer) / 3: voie Francou-Péguy / 4: tentative Chapoutot-Lemoine 1971

En d’autres temps ça m’aurait fait enrager, mais en 78 j’étais devenu nettement plus philosophe (le Rouget était passé par là !). Et puis ça me fait plaisir que ce beau tracé ait été signé par Bernard Francou, qui a été dans les années 70 un ouvreur génial, le plus souvent en association avec Jean-Michel Cambon (le JMC première manière !). Ces deux compères ont signé une collection de voies sans concession où l’élégance du tracé le dispute à l’engagement, sur la plupart des grandes murailles du massif des Ecrins : Pelvoux, Pic sans Nom, Ailefroide, Ecrins, Râteau, etc…, sans oublier les parois calcaires des Cerces ou de la Tête d’Aval. Il faudra les hivernales ou les grands enchaînements pour faire aussi bien, sous la patte des Moulin, Bérhault, Daudet, Guillaume et compagnie. Francou a ensuite quitté l’Oisans pour les charmes de la Cordillère des Andes, où le glaciologue fait bon ménage avec le glaciairiste qui a toujours dormi en lui (la preuve par la Francou-Grassi de l’Ailefroide !). Cambon a fait exactement le contraire : il est resté en Oisans pour se cantonner sur le seul territoire qui lui convienne totalement, le rocher pur (la preuve par la sortie directe Cambon-Francou à la nord-ouest de l’Olan !). Et après avoir accepté d’exposer la viande du temps de Francou, il a choisi la conception inverse en s’adonnant à l’ouverture d’itinéraires (de plus en plus) équipés. A la Meije, ça allait donner l’Epinard hallucinogène en 1983, juste à gauche de notre voie du Bastion. Décidément, celui-ci était alors promu à la dignité de laboratoire des pratiques alpines !


L’Ailefroide centrale et le Glacier Noir vus de la face nord du Pelvoux (juillet 1978). A l’Ailefroide, le Pilier des Séracs est l’une des voies Francou-Cambon devenues classiques. Noter le bel état du glacier à cette époque, quand le col de Coste Rouge (centre de l’image) s’abordait en toute simplicité…

On sent bien que ces années 70 ont été un temps de mutation et que s’est tournée la page de l’alpinisme classique, celui que j’ai eu la chance de pratiquer pendant 20 ans. C’était inévitable : on arrivait au moment où il ne pouvait plus proposer du neuf avec les moyens, quand même assez sommaires, qui étaient les siens. Un renouvellement ne pouvait se produire qu’en fonction du progrès technologique et du changement psychologique que tout progrès entraîne. Là, je pense que c’est par le fantastique renouveau de l’escalade glaciaire que le renouvellement a été le plus profond. C’est aussi une affaire de génération. La glace, c’était pas tellement mon truc, et puis je commençais à vieillir.


Méditation devant l’Ausangate (6550 m), dans la cordillère de Vilcabamba (Pérou), en 1971

Pour moi aussi les années 70 ont été un temps de changement profond. J’ai fait des expériences plutôt malheureuses quand je me suis laissé embarquer dans le circuit des expéditions. Je n’arrivais pas à me conformer à la nécessité de faire converger des énergies disparates sur des objectifs qui, pour appartenir à tous, n’appartenaient réellement qu’à quelques-uns. J’étais inapte à 100% à là dynamique de groupe que cela impose, et mon caractère de cochon n’arrangeait pas les choses. Le pire a été l’expédition au Tirich-Mir de 1974, que j’ai fini par carrément déserter… J’ai évoqué cela dans « La conquête du Truc-Much ouest n° 3 ». Si vous n’avez pas encore « La montagne c’est pointu » dans votre bibliothèque, c’est le moment de vous décider !


Au Tirich-Mir, dans l’Hindou Kouch pakistanais, en 1974. Hou la la, ça va pas bien!

La convalescence a été longue et difficile. Elle est passée par un superbe séjour au Groenland en 1975, où des gens comme François Guillot ou Bernard Gorgeon m’ont apporté la preuve qu’on pouvait grimper aux antipodes sans prendre la grosse tête – je leur dois beaucoup.


Bernard Gorgeon et Jeef Lemoine devant l’Aiguille de la République, une de nos conquêtes groenlandaises en 1975

Il y a eu aussi la réconciliation totale avec l’Oisans en 1976. Et puis surtout un certain nombre de compagnons comme Jeef Lemoine. Son optimisme, son appétit de vivre étaient renversants et contagieux. Il était toujours prêt pour sauter dans une aventure, surtout si on sortait complètement des clous. C’est avec lui que j’ai fait la seule hivernale de toute ma carrière (la face nord de Bellecôte en 1973 : Jeef était encaserné à Bourg-St-Maurice, et il espérait qu’un coup d’éclat lui vaudrait une belle permission…)


Le versant nord de Bellecôte, en Vanoise, vu du Mont Pourri

En août 1972, nous avons fait tous les deux un Pilier central du Fréney de rêve, sans utiliser le moindre téléphérique et sans rencontrer âme qui vive, sauf entre Vallot et le col du Dôme, à la descente ! Nous sommes partis un matin du fond du Val Veny pour monter dans la journée au col de Peuterey, via Monzino, le passage de l’Innominata, le glacier du Fréney et les rochers Grüber. Je reconnais que c’est un chemin assez insolite (la remontée du glacier du Fréney : inoubliable !). Nous avons fait un bivouac somptueux dans une crevasse au col de Peuterey, où nous avons taillé de véritables couchettes.


Le bassin supérieur du glacier du Fréney, avec son monstrueux sérac enserré entre le socle de l’Innominata et les Rochers Grüber. Le col de Peuterey est juste au-dessus, dominé par le Pilier d’Angle. Le Pilier Central gicle jusqu’aux nuages…

Le Pilier nous a occupés le lendemain. Sommet au crépuscule dans un brouillard londonien – c’est à tâtons qu’on a trouvé le « refuge » Vallot. Glissons sur la nuit passée dans cette chose puante, abrégée au petit matin par l’irruption des processionnaires de la voie normale, crampons aux pieds, nous piétinant sans ménagements, sans «bonjour», ni «excusez-nous». Bref, l’alpinisme-Bidochon se rappelait à nous. Nous avons retrouvé la solitude au col du Dôme en bifurquant sur la voie italienne des Aiguilles Grises, déserte comme au temps du Pape Ratti. On a débarqué à Gonella sur le coup de 10 heures. Le gardien est sorti de sa sieste pour nous restaurer, et on a arrosé le Pilier avec une bonne bouteille de Chianti. Là, l’effet a été prodigieux ! Nous avons descendu le glacier inférieur de Miage dans un état d’ébriété a faire pâlir un régiment de Polonais bourrés… !


Dans la face italienne du mont Blanc, au petit matin…

Avec Jeef, j’ai fait plusieurs courses dictées par l’improvisation la plus pure. Ainsi, on est montés une fois de La Bérarde en direction du Rouget sans savoir ce qu’on y ferait – ça a donné l’arête de la Tour Jaune, une sacrée belle bambée qui m’a donné envie de revenir au Rouget. Là aussi le retour a été fortement arrosé. A l’Ailefroide occidentale, nous sommes partis pour faire la Devies-Gervasutti et nous avons fini par attaquer plus à l’est pour rejoindre très haut l’arête de Coste Rouge. Rétrospectivement, nous avons découvert que nous avions plus ou moins suivi une « vieille » voie des frères Vernet. Nous étions sortis sur l’arête juste derrière deux CRS qui suivaient la voie classique, tout étonnés de voir deux types sortir de nulle part. J’y ai gagné un casque neuf : le mien était fêlé, l’un des CRS m’a proposé un échange standard, aux frais de la République.


Vadrouille sur les arêtes du Rouget (1976)

C’est encore avec Jeef que j’ai fait ma première voie à l’Epéna, là aussi à l’improviste. Nous voulions faire la voie des Suisses de la Pointe orientale, dont je m’étais procuré le topo. Arrivés sur place nous avons été littéralement saisis par l’allure de l’éperon de l’Aiguille. C’est un éperon gigantesque (935 m de dénivelée nette, mais un putain de développement), dont aucun topo n’existait. Et pour cause : il avait aussi été remonté par des Suisses (Pierre-Louis Hofmann et Bernard Voltolini), mais Lucien Devies s’était emmêlé les pinceaux quand il avait fait le compte-rendu sur la Chronique Alpine, et il avait confondu cette voie avec une autre. Il est vrai que la toponymie de l’Epéna n’est pas simple (elle distingue arbitrairement quatre sommets, dont une Aiguille et trois Pointes), et d’autre part les notes des Suisses n’étaient pas parfaitement claires. Comme Devies ne connaissait rien à cette face, tous les risques de méli-mélo étaient réunis. Je n’ai su que plus tard par Charles Maly que cet éperon avait déjà été fait. Et encore beaucoup plus tard j’ai eu entre les mains un article très emphatique de la Tribune de Genève, sous la signature de Guido Tonella.

Visiblement, celui-ci voulait magnifier le rôle (en vérité exclusif) que les Suisses avaient joué dans l’exploration de la muraille géante de l’Epéna : en deux ans, Voltolini, Hofmann, Jean Rod et Marcel Schneider avaient effectivement conquis les trois éperons les plus évidents (Voltolini est revenu en 81 avec Guy Buisson pour faire une quatrième voie). Rédigé à partir d’une interview de Voltolini, l’article de la Tribune établissait une comparaison entre l’éperon de l’Aiguille et l’Eigerwand, rien de moins. Rétrospectivement, cette comparaison m’a quand même surpris. Je n’ai pas fait l’Eigerwand, mais je suis sûr que l’Epéna n’est ni aussi haute, ni aussi dure, ni aussi engagée…


Bernard Voltolini.

Encore que, avec Jeef, on avait fait ce qu’il fallait pour lui donner du piquant. D’abord, on n’avait décidé d’y aller qu’à la dernière minute, saisis par la vision, impressionnante et alléchante, de cet éperon que l’on croyait vierge. Et ensuite parce qu’au moment de nous encorder, je me suis aperçu que je m’étais trompé de corde ! Au lieu de prendre une corde de rappel, j’avais pris une corde simple de 40 mètres… S’embarquer dans une paroi inconnue de 1000 mètres avec un simple petit brin, était-ce bien raisonnable ? Il faut croire que oui, puisque nous y sommes allés. Cette voie ne nous a pas particulièrement emballés : l’escalade y est quelconque, le rocher le plus souvent bien mauvais. A plusieurs reprises nous avons dû grimper ensemble sur de longues distances sans avoir le moindre point d’assurage. Le premier qui éternuait, ça faisait deux morts… Je me demande d’ailleurs pourquoi on restait encordés ! Mais c’est vrai qu’il y avait une grosse ambiance, rendue plus aiguë par l’incertitude de la sortie : le haut du pilier est formé d’une tête déversante, et on n’était même pas sûrs de pouvoir surmonter le surplomb terminal. En fait ce surplomb est comme un faux nez : au dernier moment s’est présenté un dièdre hospitalier (et en bon rocher, enfin !) qui nous a permis d’envisager le retour avec sérénité. Ce premier contact avec l’Epéna me laissait mi-figue, mi-raisin. Mais j’étais comme McArthur quittant les Philippines en 1942, bien décidé à revenir.


L’Aiguille et la Pointe orientale de l’Epéna. Entre 800 et 1000 m de muraille… Le bas de l’éperon nord-ouest de l’Aiguille, ainsi que l’Encorgnelu, sont en quartzites (roches sombres). Le reste est en marbre jurassique.

L’un de mes moments les plus pittoresques avec Jeef a été une ascension du Grépon-Mer de Glace en septembre 71. Le refuge de l’Envers était vide, sans gardien, et… nous n’avions pas de montre. Pas le moindre réveil dans le refuge. Nous nous sommes donc levés quand nous nous sommes réveillés, probablement assez tard. Et il y avait déjà de très mignons lenticulaires sur la Verte. Cela ne nous a pas dissuadés, et d’ailleurs tout s’est très bien passé, sauf que le ciel est devenu assez rapidement opaque, puis gris, puis noirâtre. En vue de la fissure Knübel, ça tournait à l’anthracite. On n’a pas cherché à visiter le passage historique, et je me suis rué vers la Brèche Balfour. Quand j’ai passé les yeux, c’était l’horreur : un mur blanc nous arrivait dessus ! D’accord, ça tranchait sur le noir, mais ça a vite été l’apocalypse. Nous avons descendu tant bien que mal la zone rocheuse pour échouer sur le glacier des Nantillons dans une lumière glauque qui diminuait à toute vitesse. Là, on a commencé à regretter notre panne d’oreiller ! Il y avait une vieille trace sur le glacier pour nous guider, mais la neige la comblait à toute vitesse et on ne voyait absolument plus rien en arrivant au Rognon. Je me souvenais vaguement de la façon de le quitter et de traverser sous la vilaine chute de séracs qui le bordait à l’époque (elle ne doit plus y être !). A ce moment-là, je me suis perdu complètement. On s’est retrouvés dans la fameuse chute, avec comme seule ressource d’essayer de la descendre – jusqu’au moment où nous avons perdu tout repère. Nous avons donc passé la nuit là, dans la tourmente, attendant qu’un sérac nous tombe sur la tête. Je m’étais étendu dans la neige (humide !), tandis que Jeef est resté assis sur son casque jusqu’au jour… En plus de l’optimisme et de l’humour, Jeef avait les fesses blindées… !


Jeef devant Temple Crag, dans la chaîne des Palissades (Sierra Nevada, Californie) en 1977

Et puis, et puis… je pourrais en évoquer encore bien d’autres, avec l’ami Jeef. Ma gamelle sur le névé durci au pied du Rouget en 74, 500 mètres de galipettes qui m’avaient épluché comme un concombre, notre descente droit sur les Etages à travers les barres rocheuses, moi sanguinolant et rendu aveugle par une ophtalmie essayant de nous guider de mémoire, puis obligé d’installer des rappels à tâtons parce que Jeef ne savait pas pitonner, et que naturellement nous nous étions perdus… Mais aussi et surtout les bons souvenirs, les heures vécues au Sahara, au Groenland, en Californie ou au Colorado – et à la Meije, puisque c’est avec Jeef que j’ai enfin fait la face nord directe, en août 1976. On a beau faire le tour du monde, la Meije, on y revient toujours !

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